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Comme vous le savez sans doute, nous sommes, Alexis et moi-même, tous deux originaires de Nice. Une ville que nous avions en partie quittée il y a quelques années faute d’une actualité culturelle (et surtout musicale!!!) vibrante. Alors que Paris et ses centaines de concerts événements nous faisaient secrètement de l’œil, Nice nous sortait de notre torpeur seulement 2 fois par an à l’occasion d’ un concert sympa au Lino Ventura. Il aura sans doute fallu que nous partions pour que la French Riviera se réveille et se mette à concurrencer petit à petit les villes de province. Et même si on regrette que tout cela ne soit pas arrivé avant, on est heureux d’assister au soulèvement d’une musique moins (comment dire poliment?) « populaire » mais qui mérite tous les détours! Avant les nombreux rendez-vous de l’été, place au Midem Festival qui accueillait cette année à Cannes un line-up en tout point réjouissant. Ne pouvant pas être sur les lieux, on a laissé les clefs de la maison à Florian et Vincent, tous deux aspirants avocats qui ont troqué robes et plaidoiries contre appareils photos et accreditations presse le temps de trois soirées placées sous le signe de la musique et des découvertes.

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En marge du congrès réunissant les professionnels du secteur de la musique, la Croisette accueillait pour la deuxième année consécutive le Midem Festival, l’occasion pour vos humbles serviteurs de découvrir des artistes aux qualités aussi diverses que leurs origines.

C’est sous un superbe cirque d’hiver renommé pour l’occasion « Magic Mirrors » que vous autres festivaliers avez peut-être déjà eu l’occasion de visiter lors de vos pérégrinations musicales, que se tenait le Midem Festival. Posé au pied du Palais des festivals, à deux pâtés de sable de la Méditerranée, cet écrin nous accueille dans son intimité et la chaleur de ses drapées de velours bordeaux et structures en bois vernis.

Day 1 : Yes Sir Boss, Asaf Avidan et Madness

La soirée débute avec YES SIR BOSS, un jeune groupe britannique dont le principal fait d’arme est d’être la première signature et production du label créé par la chanteuse de soul et jazz Joss Stone. Les six membres ont très vite pris la mesure de la scène et de la salle et ont déversé sur nous un rock gipsy et joyeux laissant la part belle aux cuivres, qui n’est pas sans rappeler les compositions du No Smoking Orchestra (avec une moyenne d’âge moitié moindre tout de même). Leur set d’un peu moins d’une heure nous a permis de découvrir l’ensemble de leurs jeunes et joyeuses productions (ils auront l’intelligence de distribuer eux-mêmes leur EP après leur prestation).

Après une courte pause, on enchaîne avec ASAF AVIDAN, l’auteur-compositeur-interprète israélien à crête d’iroquois dont on pourrait jurer qu’il vient de s’échapper du diary d’Hedi Slimane. Le contraste est alors saisissant entre les deux performances. Accompagné de ses trois musiciennes et choristes ainsi que d’un batteur, chacune des compositions nous heurte en plein cœur. La voix d’Avidan nous transperce ; ses rifs nous déchirent. Les thèmes abordés sont aussi sombres que l’interprète. A chaque interlude, il prend le temps de parler de lui, se livre sur son parcours ainsi que sur l’origine de chacune des chansons, le tout d’une voix douce et fluette ; sans doute pour mieux régénérer celle-ci après l’avoir poussé jusqu’à la stridence et au hurlement pendant le chant. Ainsi, avant d’achever sa prestation par «One Day », il nous raconte comment il a tout d’abord détesté son remix par Wankelmut avant d’accepter celui-ci comme une œuvre à part entière qui lui a permis d’être reconnu et de toucher un public plus large. Seul avec une guitare acoustique, il achève sa prestation avec brio après avoir électrisé le public une dernière fois.

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En clôture de cette première soirée, la programmation nous avait réservé un groupe olympique, que-dis-je, un groupe royal : MADNESS ! En effet, après avoir clôturé les JO et fêté le Jubilé de diamant de la reine, la (re-)formation britannique a eu la bonne idée de venir goûter à l’hiver azuréen, et ce pour le plus grand plaisir des quadras et quinquas présents dans la salle (et costumés pour certains). Que ce soit dit, le groupe ska a littéralement fait chavirer le chapiteau plein à craquer pour l’occasion ! Et quelle ne fût pas notre surprise de voir toutes ces personnes de la génération de nos parents reprendre les paroles à tue-tête et se lancer dans des pogos (bien que très courtois …) ! Nous nous sommes rapidement pris au jeu et avons déhanché au maximum de notre capacité sur le tube « Our house », finissant ainsi cette première soirée dans une joie certaine, et dans l’impatience de la soirée suivante aux accents aussi rap et électro que celle s’achevant fût rock&roll.

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Day 2 : Birdy Hunt, Drunken Tiger et C2C

Au programme de notre deuxième soirée au cœur du cosi Magic Mirrors, une programmation si variée qu’elle nous a fait voyager de Paris à Nantes avec une escale en Corée. Cet itinéraire, bien que peu commun, valait tous les détours du monde.

Au départ de Paris nous sommes accompagnés par BIRDY HUNT , un groupe de rock français comme on aimerait en voir plus souvent.  En leur compagnie le décollage est aussi soudain que turbulent. Et pour cause, les six parisiens enchaînent les morceaux à la vitesse d’un avion de chasse en plein « dogfight ». Sur scène, chaque membre du groupe se donne à fond. Cette débauche d’énergie est communicative et s’empare d’un public déjà conquis. Si les yeux en ont pour leur argent les oreilles ne sont pas en reste. Bien que leur discographie (seulement deux EP à ce jour) puisse laisser penser qu’il s’agit d’un jeune groupe « indé »  en devenir,  leur expérience sur scène ne fait aucun doute. Un coup d’œil à la bio du groupe suffit à comprendre le pourquoi du comment. Après une tournée anglaise d’une quinzaine de dates en 2007 (année de  formation du groupe!), les Birdy Hunt  se sont offert quelques festivals qui en feraient baver plus d’un : Le printemps de Bourges et une participation aux Avant Seine du non moins célèbre Rock en Seine. Dans ces conditions il n’est pas étonnant que leur dernier single Your Friend ait été choisi par les organisateurs du Midem Festival comme hymne de cette mouture 2013. Autant vous dire que ce premier vol est passé à la vitesse du son. En l’espace d’une demi-douzaine de morceaux nous voilà déjà en train de descendre vers Séoul.  Et à travers le hublot, on aperçoit déjà le tigre ivre pointer le bout de son museau.

On enchaîne donc avec DRUNKEN TIGER. J’entends cette petite voix qui dans votre tête vous dit : « Drunken quoi ? ». En tout cas c’est ce qu’a dit la mienne à la découverte du programme de ce dimanche soir. Inconnu au bataillon. Mais quand on voyage, c’est pour être dépaysé et pour être franc, nous n’avons pas été déçu du voyage. Le tigre est arrivé sur scène avec  trente minutes de retard. Non pas parce qu’il titubait en raison de son ivresse, mais à cause d’une sombre histoire d’accréditation introuvable. Deux précautions valant mieux qu’une, JK gardera la sienne autour du cou tout au long de sa performance. Et quelle performance ! Impossible d’ évoquer avec vous le fond du message que Drunken Tiger  entend faire passer au travers de ses rimes endiablées ayant trop de lacunes en coréen mais quelle énérgie ! JK et Block-B ont un flow qui n’a rien à envier aux plus respectables rappeurs de la west-coast. T, dont le flow n’est pas en reste, nous a quant à elle envoutés tant avec sa voix qu’avec son jeu de regard malicieux. Ajoutez à ça des samples et des instru’ chiadés et vous obtenez un Kimchi des plus succulents. Mais on est déjà en retard, l’avion à destination de Nantes  est sur le point de décoller et il n’est pas question de le rater, même si JK, en représailles des formalités administratives qu’on lui a imposé pour se produire sur scène (rappelez vous l’accréditation oubliée) nous a offert un extra, au grand dam du régisseur déjà en retard sur son plan de vol.

Nous voilà donc en route vers notre destination finale. Si le voyage a été enchanteur jusque là, nous n’avons pas bouder notre plaisir en atteignant la destination finale ce périple : « Coup2Cross » ou si vous préférez C2C (« SITOUSSI » pour les plus avertis d’entre vous). Nous les attendions avec impatience ces quatre nantais qui se sont rencontrés sur les bancs du lycée. Et nous n’étions pas les seuls. Le Magic Mirrors était plein à craquer. Le quatuor a enchaîné les festivals tout au long de la saison 2012. Et après cette soirée, je comprends pourquoi. Sur scène, C2C c’est d’abord un spectacle visuel ! Sur la façade des blocs qui supportent chacune des quatre platines, sont accrochés des écrans qui s’illuminent au rythme des scratchs effrénés des quintuples champions du monde par équipe du DMC. Sur scène, C2C c’est ensuite un spectacle varié.  20syl, Greem, Atom et Pfel ne restent pas scotchés derrière leurs vinyles. Ils bougent, dansent, rappent et vont jusqu’à échanger tour à tour leurs places pour nous montrer à quel point ils maîtrisent leur art. En somme, ils font tout le nécessaire pour que l’ambiance ne s’essouffle pas un instant. Sur scène, C2C s’est enfin l’équivalent acoustique d’un vol supersonique. Les morceaux s’enchainent comme un évidence. Ils attrapent chaque spectateur pour le faire bouger, sauter, lever les bras, crier ou pour certains plus pudiques, balancer la tête. Mais quelle que soit la façon dont chacun vit cette expérience rare, il est impossible d’avoir envie que cela s’arrête. Mais malheureusement toutes les bonnes choses ont une fin et après presqu’une heure passée au septième ciel c’est contraints et forcés que nous revenons sur terre. La Magic Mirrors se vide et ferme ses portes. Mais un rassurez vous, un nouveau départ était prévu pour le lendemain.

Day 3 : Balthazar, Lou Doillon et Archive

Sur le papier, c’est sans conteste la soirée qui nous faisait le plus de l’oeil. Entre des petits belges qui nous ont fait chavirer avec leur album Rats en 2012, la jolie et délicate Lou Doillon véritable révélation de l’année et les britanniques surdoués d’Archive on ne pouvait rêver mieux pour dire au revoir au Magic Mirror.

Après une jolie mise en bouche par Endah N Rhesa dont le talent immense nous sautera aux yeux en à peine quelques morceaux, la place est faite pour accueillir Balthazar. Ce groupe originaire de Belgique encore méconnu il y a un an a fait un retour remarqué sur le devant de la scène avec Rats, un album lumineux et ambitieux synonyme de sortie de l’ombre pour le groupe crée en 2000. Sur scène l’histoire de Rats semble se répéter. Si on a du mal à entrer dans l’ambiance et à se laisser bercer par le rock orchestral de Balthazar, le charme opérera un peu plus tard. Il faut laisser du temps à la musique pour nous séduire et nous emporter définitivement. L’audace sonore du groupe mêlant pop et rock avec l’utilisation peu conventionnelle de synthés et d’un violon nous prouve que le rock alternatif a encore de belles années devant lui ! La voix de Maarten Devoldere n’étant pas sans rappeler un certain  Thom Yorke … A suivre donc et de très très près.

Petit répit après ce joli moment passé en compagnie de Balthazar et il est déjà l’heure pour Lou Doillon d’entrer en scène. La fille de Jane Birkin que tout le monde attendait au tournant avait déjà envoyé sa plus belle réponse avec un sublime album Places mais se devait d’assurer derrière la tournée. Contrairement à sa demi-soeur, Lou n’est pas timide et aime la scène ou du moins tente de l’apprivoiser. Nerveuse certes mais souriante la jolie brune débarque sous le chapiteau, manteau boyfriend sur les épaules et peut commencer son rituel chaman. En deux chansons le tour est joué. La voix aussi pure et précise que sur l’album semble trouver tout son sens sur scène. Une preuve unique de montrer aux derniers haters que la chanteuse a de la voix ! Toujours souriante et bienvéillante , Lou Doillon confirme qu’elle est une artiste sympathique sans prétentions qui ne comprend toujours pas trop ce qu’elle fait là. Même si on aurait aimé la voir un peu sortir des rangs et ne pas reproduire sur scène l’intégralité de l’album, on reste scié par les qualités vocales de Lou Doillon qui ne plie pas devant un public, bien au contraire. L’apothéose viendra avec Places, avant-dernier morceau de l’album dont le final vous prend aux tripes. Là le concert décolle complètement pour un finish d’une puissance rare. Electrisé, envouté, difficile alors de redécendre sur Terre même si on sait que d’autres immenses prestidigitateurs arrivent juste derrière.

Sans transition on enchaînera donc avec Archive. Le style du collectif britannique  tranche radicalement avec la douceur de Lou Doillon. La belle laisse place aux  sons des samples, des basses, des percussions et des guitares saturées des huit  membres présents sur scène ce lundi soir. Ont répondu à l’appel Darius Keeler et  Danny Griffiths aux claviers, David Penney et Pollard Berrier aux guitares et au chant, Steve Barnard à la batterie, Maria Q et la ravissante Holly Martin au chant. La sortie au mois d’août de leur dernier album With Us Until You’re Dead ne nous aura toutefois pas privé du plaisir d’entendre quelques-uns des classiques de ce groupe atypique à la discographie bien fournie. Maria Q et Holly Martin nous ont transportés au moyen de leurs voix profondes et envoutantes. Les artistes masculins présentssur scène, bien qu’au service de ces dames, n’ont pas pour autant hésité à imposer leur style. Ils nous ont ainsi gratifiés de quelques morceaux bien rock qui ont fait trembler le parquet du Magic Mirrors. Nous n’aurions pu espérer mieux en clôture de ce Midem Festival 2013.

Et voilà il nous faut maintenant faire nos adieux au Magic Mirrors et lui souhaiter bonne route jusqu’à sa prochaine escale. De notre côté nous avons hâte d’être plus vieux d’un an pour participer à la troisième édition de ce festival hivernal auquel nous souhaitons longue vie tant le millésime 2012 nous aura conquis.

F&V

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