Parmi les réalisateurs français qu’on aime particulièrement, il y a Christophe Honoré. Depuis Les Chansons d’Amour, le réalisateur tient une place à part dans nos cœurs. Et cette place n’a cessé de grandir avec le magnifique Le Lycéen ou sa pièce de théâtre absolument bouleversante, le Ciel de Nantes. Aussi, lorsque l’on apprend la séléction de Marcello Mio au Festival de Cannes, le cœur bat un peu plus fort. Le pitch, sur le papier, est un bonbon : Chiara Mastroianni, jouant peu ou prou son propre rôle, veut désormais qu’on l’appelle Marcello. Autour d’elle (sa famille et amis qui jouent leur propre rôle également), on hésite entre révélation sublime ou farce de mauvais goût. Un film qu’on imaginait déjà sublime tant ses évocations cinématographiques et sa question meta de la perte du père nous paraissaient terrain grandement fertile.
Marcello Mio est de ces films qu’on aime pour ce qu’ils représentent. Ici, Chiara Mastroianni, se met du jour au lendemain à parler italien et à s’habiller en homme pour se rapprocher de son père, Marcello, décédé alors qu’elle n’avait que 24 ans. Autour d’elle, sa mère, Catherine Deneuve. Benjamin Biolay, l’ex-mari, Melvil Poupaud, ami de toujours. Bref, le clan Deneuve / Mastroianni est réuni. Et c’est un immense plaisir de les voir jouer leur propre rôle. Leur propre vie (ou presque). Benjamin Biolay répète avec Chiara “La Ballade du mois de Juin” et Catherine joue avec son statut d’icône. On a l’impression de faire partie de leur vie. De faire partie de cette famille. D’ailleurs, on accepte d’intégrer Fabrice Luchini le temps de cette escapade. Un casting cinq étoiles qu’on prend beaucoup de plaisir à suivre.
Dans Marcello Mio, Christophe Honoré, évoque les fantômes. D’abord Marcello mais aussi les souvenirs qui n’en sont plus et qu’on veut ranimer. Cette idée, si belle soit-elle, ne fonctionne pas complètement. La raison à cela ? Peut-être Chiara Mastroianni qu’on n’arrive pas à totalement oublier quand elle se travestit en son père. Lui si vivant, si impertinent, elle, toujours un peu désolée d’être “la fille de”(le film commencera d’ailleurs autour de cette idée). Alors quand elle entreprend le projet de devenir son père, on n’y croit pas vraiment. Si bien que quand Catherine manque de confondre sa fille et son ex-compagnon, on se dit qu’on a raté quelque chose. Si on est hyper fan des rôles “secondaires” qui se moquent d’eux-mêmes, on est un peu moins emballés par la rencontre entre Marcello et Colin, un militaire anglais (coucou les Demoiselles de Rochefort) qui va tomber sous le charme de Chiara au masculin. Le film flottant toujours entre rêve et réalité, on ne sait pas dire si cette histoire existe réellement ou si elle est extraite de films joués par Marcello Mastroianni. Bref, un peu complexe tout ça. On aurait presque préféré qu’Honoré joue à fond la carte de la fantaisie et de la rêverie.
Aussi, le film est doté d’une très grande nostalgie et manque par moment de mordant et ne décolle pas réellement. Christophe Honoré semble nous dire que “c’était mieux avant” sans qu’on sache très bien pourquoi. Alors oui, comme il sait si bien le faire, Christophe Honoré arrive à nous prendre les sentiments. Ici, c’est quand Catherine Deneuve chante les mots d’Alex Baupain “Dis Marcello, pourquoi tu ris ? “. Un film plaisant mais qui aurait pu être un très très grand film tant l’idée était magnifique.