Après Des vents contraires en 2011, Jalil Lespert monte en puissance en s’attaquant au mythe YSL. Premier des deux films prévus cette année sur l’un des plus célèbres couturiers que la France ait connu, ce YSL annonçait du très lourd avec son casting 100% pensionnairede la comédie française.

Paris, 1957. A tout juste 21 ans, Yves Saint Laurent est appelé à prendre en main les destinées de la prestigieuse maison de haute couture fondée par Christian Dior, récemment décédé. Lors de son premier défilé triomphal, il fait la connaissance de Pierre Bergé, rencontre qui va bouleverser sa vie. Amants et partenaires en affaires, les deux hommes s’associent trois ans plus tard pour créer la société Yves Saint Laurent. Malgré ses obsessions et ses démons intérieurs, Yves Saint Laurent s’apprête à révolutionner le monde de la mode avec son approche moderne et iconoclaste.

Plus de cinq ans après la mort d’Yves Saint Laurent, deux cinéastes s’attaquent à l’homme derrière les initiales, à l’ambitieux visionnaire dont le mythe a traversé les époques et l’image à jamais transformé le paysage de la haute-couture. La preuve que cette histoire est encore d’actualité et continue de fasciner le monde. YSL c’est bien sur le célèbre couturier de Dior qui a monté sa propre marque de haute couture mais c’est surtout un couple mythique que lui et Pierre Berger formaient. Et c’est sous cet aspect là que Jalil Lespert a décidé de construire son projet.

Oui car si YSL commence (presque) au balbutiement de l’ascension du jeune Yves Henri Donat Mathieu-Saint-Laurent, c’est bien l’histoire d’amour entre Pierre Berger et le couturier que l’on va suivre. De leur rencontre à la toute fin. Jusqu’à ce que la mort les sépare… Bref avant la mort, l’amour. L’histoire d’une passion dévorante entre un maître et son disciple, entre un génie et un mentor, entre un artiste et un gestionnaire sans qui rien de tout cela n’aurait été possible. Là on se rend vite compte que la mode et la haute couture est un prétexte et que tout autre univers aurait fait l’affaire en guise de background. Place à l’amour donc et à une somptueuse histoire qui va surmonter tous les obstacles. Une histoire où les deux amants s’attirent oui mais s’inspirent surtout pour devenir des grands de ce monde.

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Si on comprend le parti pris de montrer une histoire d’amour, on regrette un peu de ne pas en avoir vu plus sur l’univers de la mode. D’abord parce que l’histoire commence quand YSL devient un homme et on ne comprend pas vraiment la nature de la vocation. On regrette aussi que les mimétismes et la gestuelle parfaite de Pierre Niney ne soient pas plus exploités et montrés à l’écran. On voulait de la création, du tissu qu’on assemble et des robes qui se conçoivent, on aura des dessins et deux défilés… Tant pis on en ressort avec l’envie encore plus grande de nous plonger dans l’univers d’Yves Saint Laurent.

Jalil Lespert n’hésite pas à nous exposer de manière très crue les choses. Ainsi, les scènes de sexe, les trips hallucinés sous drogues sont clairement montrés et jamais suggérés. Parfois on se demandera pourquoi s’attarder sur certaines scènes (clairement le passage au Maroc est d’une inutilité inexplicable) mais on se laisse clairement emporter par l’histoire d’un artiste malade, incapable de vivre normalement. Difficile aussi de s’attacher au personnage d’Yves Saint Laurent finalement assez égoïste et égocentrique qui va bruler sa vie sans demi-mesure. Bien sur on comprend la soif de vie d’un jeune homme que l’on a privé de sa jeunesse mais ça ne fait pas tout… Et puis si Jalil Lespert voulait aller dans le trash et montrer un YSL pas très glorieux peut-être aurait-il dû aller plus loin et prendre vraiment des risques. Un manque de risque qui se ressent d’ailleurs clairement ici tant YSL pourrait passer pour une fiction télévisée (de luxe certes).

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Ne croyez pas que l’on ai détesté YSL, loin de là, mais nous en attendions peut-être un peu trop. Il faut dire qu’avec les performances hallucinantes des deux acteurs, on est forcément déçu que le film ne soit pas plus grand, plus inoubliable. Pierre Niney est méconnaissable en YSL tant il a avalé l’aura et la timidité du couturier. Dès qu’il ouvre la bouche, on se laisse complètement saisir et la notion de performance d’acteur prend tout son sens. Dès qu’il pose une main sur un tissu on se dit que la préparation au rôle a dû être intense. Enfin, préparation au rôle pas vraiment puisque Pierre Niney EST Yves Saint Laurent. A ses côtés, Guillaume Gallienne est tout aussi bluffant. Même si la transformation est moins folle, l’habilité avec laquelle il s’installe dans la peau de Pierre Berger est saisissante. Et quand il apparaît comme clef de voute à l’édifice YSL et surtout à l’homme à l’origine de cela, les frissons nous parcourent immédiatement. Gallienne n’a-t-il jamais été si émouvant ?

Côté casting féminin on retiendra Charlotte Le Bon qui épate à chacun de ses passages sur grand écran. Seule à sauver du casting féminin à côté d’une Laura Smet inutile et d’une Marie de Villepin dont on ne retiendra rien.

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Sans être le film de l’année, YSL reste un très bon film français sur un artiste à part dont la vie très Rock n Roll en fait un personnage résolument moderne. Si on aurait aimé plus de folie et d’audace on reste bluffé par le duo d’acteurs qui crève l’écran pour illustrer un Amour majeur au service d’un art mineur. A moins que ce ne soit l’inverse…

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Cinéphile aux lacunes exemplaires, mon coeur bat aussi pour la musique, les chaussures léopard et les romans de Bret Easton Ellis. Maman de 2muchponey.com, niçoise d'origine, parisienne de coeur, je nage en eaux troubles avec la rage de l’ère moderne et la poésie fragile d'un autre temps. Si tu me parles de Jacques Demy je pourrais bien t'épouser.

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