Pour son premier film en tant que réalisateur, le génial Guillaume Gallienne décide de raconter son histoire dans une immense déclaration d’amour au cinéma et surtout aux femmes. Chronique d’un film à part.

Le premier souvenir que j’ai de ma mère c’est quand j’avais quatre ou cinq ans. Elle nous appelle, mes deux frères et moi, pour le dîner en disant : “Les garçons et Guillaume, à table !” et la dernière fois que je lui ai parlé au téléphone, elle raccroche en me disant : “Je t’embrasse ma chérie” ; eh bien disons qu’entre ces deux phrases, il y a quelques malentendus.

L’histoire avec Les Garçons et Guillaume, à table ! remonte en Mai dernier. En plein festival de Cannes, la presse n’a qu’un nom à la bouche : Guillaume Gallienne. Décrochant deux prix à la Quinzaine des réalisateurs, ce petit film au nom si long à écrire devient le must-see pour tout festivalier qui se respecte. Un petit rattrapage le jour de la clôture (avec en prime une belle frayeur d’assister à un film obscur mexicain mais ceci est une autre histoire) plus tard et nous voilà conquis! Depuis on l’a vu 3 fois et on arrive toujours pas à s’en défaire !

On doit avouer que sur le papier c’était pas gagné ! Un projet tellement personnel et atypique qui aurait pu facilement en déconcerter plus d’un, un double rôle à assurer et à assumer et surtout une adaptation théâtrale à réussir. Après 1h30 on se dit que l’ambition presque démesurée de Gallienne était tout à fait légitime.

Déjà parce que d’une histoire vraiment personnelle, le pensionnaire de la comédie française arrive à livrer un film universel et vraiment très juste. Les Garçons et Guillaume, à table ! c’est l’histoire d’un garçon qui a du prouver son hétérosexualité à une famille qui l’avait décrété homosexuel. Les Garçons et Guillaume, à table ! c’est une quête d’identité, un combat permanent contre les clichés et contre les dictats d’une normalité qu’on nous impose à tous. Guillaume est un garçon atypique, fasciné par sa mère et pas vraiment sportif. Il sera gay sinon rien ! Une opinion générale  qui aura raison de lui jusqu’au jour où ,enfin, il tombera amoureux. Le film raconte alors comment il est difficile d’exister et d’être qui l’on est dans une société où les autres vous mettent constamment dans des cases. Le film raconte comment vous finissez par vous adapter à la case qu’on vous a attribué même si ce n’était pas la bonne…

Si on reconnait à Les Garçons et Guillaume, à table ! une réussite totale sur le plan comique c’est surtout grâce une écriture absolument sublime. Les répliques fusent, les mots restent devant ce portrait de famille aussi juste que grinçant. On est pas prêt d’oublier les rêves en Sissi ou les esclandres totalement géniales de la mère. On oubliera pas non plus certaines trouvailles exquises d’un passage devant le psy de l’armée ou les ratés sportifs de notre jeune Guillaume.

Là où Les Garçons et Guillaume, à table ! surprend carrément c’est dans son double langage. Derrière les rires, les blagues, les situations comiques se cachent un lourd traumatisme. Des moqueries, des injures, des humiliations qui ont laissé des traces. D’ailleurs ce film est en quelque sorte un exutoire, une thérapie au delà du témoignage pour panser des blessures bien profondes. Difficile alors d’expliquer comment la magie opère. D’expliquer comment Guillaume Gallienne parvient à nous provoquer un sourire quand la seconde d’après on a du mal à respirer. Difficile d’expliquer comment ce grand MONSIEUR a fait pour atteindre un tel équilibre évitant toujours le pathos ou les lourdeurs ! Si des répliques tordantes nous resterons en tête, ce sont des moments de grande désespérance qui nous couperont le souffle. Une chute dans une piscine habillé et c’est tout le film qui prend son sens.

En plus d’être une véritable ode identitaire, Les Garçons et Guillaume, à table ! est une déclaration d’amour au cinéma (on découvre ici comment Guillaume Gallienne est tombé dedans, son amour pour le théâtre…) et surtout aux femmes ! Quand il n’étudie pas le souffle de ses camarades de pensionnat, il imite la gestuelle des femmes de sa vie avant de se livrer dans les dix dernières minutes à une magnifique et bouleversante déclaration à sa maman. On ressort de là tout simplement secoué !

On ne s’attardera pas non plus pour vous dire l’évidence : Guillaume Gallienne est immense ! Autant lorsqu’il s’agite devant la caméra dans son propre rôle et celui de sa mère (l’astuce est ingénieuse) que lorsqu’il se pose derrière et propose un film techniquement génial et intelligent. Un césar du meilleur acteur et du meilleur premier film ne seraient que justice ! Réponse en Février. D’ici là, courrez-le voir, coup de coeur assuré !

Author

Cinéphile aux lacunes exemplaires, mon coeur bat aussi pour la musique, les chaussures léopard et les romans de Bret Easton Ellis. Maman de 2muchponey.com, niçoise d'origine, parisienne de coeur, je nage en eaux troubles avec la rage de l’ère moderne et la poésie fragile d'un autre temps. Si tu me parles de Jacques Demy je pourrais bien t'épouser.

2 Comments

  1. ✿Ptite Bulle d'Elo✿ Reply

    Je ne lis que du bien de ce film et j’avoue que le pitch me tente pas mal :) A voir donc! bisous!

  2. ✿Ptite Bulle d'Elo✿ Reply

    Je ne lis que du bien de ce film et j’avoue que le pitch me tente pas mal :) A voir donc! bisous!

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