Tout juste un an après le fabuleux La Guerre est déclarée, Valérie Donzelli est déjà de retour avec Main dans la Main. Une bande annonce burlesque à souhait, une autre Valérie en tête d’affiche et un morceau d’Elli et Jacno en guise de titre, que vaut réellement ce troisième long métrage de la réalisatrice ?
Main dans la main c’est l’histoire d’une professeur de danse à l’opéra Garnier, Hélène Marchal et d’un petit vitrier de province, Joachim Fox. Alors que Joachim vient prendre les mesures pour des nouveaux miroirs à l’opéra de Paris, un baiser complètement inattendu est échangé entre Hélène et Joachim. Dès lors, ils semblent collés dans l’incapacité totale de s’éloigner l’un de l’autre. Une force étrange les unit au point que, sans qu’ils puissent comprendre ni comment, ni pourquoi, ils ne peuvent plus se séparer.
Drôle de projet que ce nouveau long métrage. Même si depuis la Guerre est déclarée on avait placé Valérie Donzelli et Jérémie Elkaim sur un piedéstal et avions dévorés tous les projets qui les unissaient, on a quand même eu un peu peur quand on a découvert la bande annonce de Main dans la Main. Un film aussi burlesque et loufoque pouvait-il être aussi beau, poétique et bouleversant que la Guerre est déclarée ? Valérie Donzelli avait-elle atteint les sommets avec son dernier film et pouvait-elle faire mieux ou du moins tout aussi bien ? Et cela d’autant plus quand le couple Elkaim/Donzelli est cassé à l’écran ?
Après un génial générique de début, on prend petit à petit la mesure de Main dans la Main. On fait connaissance avec le monde de Joachim et celui d’Hélène et on comprend très vite que le film sera autour du clivage classe moyenne plutôt rurale et bourgeoisie mondaine. Les premières images nous rappelleront pourquoi on aime tant les films de Donzelli et sa capacité singulière à filmer un quotidien pour le sublimer, le rendre quelque peu magique. Quand on voit Joachim fendre les paysages sur son skateboard sous la musique d’OMITD on est comme hypnotisé prêt à prendre la claque qu’on attend.
Si Donzelli a quité le côté bobo parisien, on commence à s’inquiéter lorsqu’elle filme la province et ces gens pas tout à fait comme les autres. On est un peu septique sur l’avalanche de clichés qui s’abat sur nous quand elle nous décrit la famille de Joachim. La maison un peu trop rurale, le village dans lequel il n’y a rien à faire, la soeur postière, la mamie originale, des tas d’enfants qui courent partout et surtout une passion pour la soeur, Véro, et un rêve partagé de participer au Grand Concours de danse amateur de Monaco … Là on se dit qu’on va pas du tout kiffé le côté confessions intimes de Donzelli qui ajoute à cela une relation à la limite de l’inceste entre le frère et la soeur. Un passage un peu lourdingue où la transformation de Donzelli en mère de famille un peu beauf nous fera regretter l’époque où elle déambulait dans Paris.
Si la rencontre entre Joachim et Hélène réussira à nous donner à nouveau le sourire, il nous faudra du temps pour accepter le postulat de départ du film. Quand on voit ces deux-là commencer à se suivre et à reproduire les gestes de l’autre on reste un peu de glace face à ce comique de situation qui ne prend manifestement pas chez nous. C’est finalement quand Valérie Donzelli confrontera les deux mondes que la recette commencera à faire son effet. On rit alors beaucoup de l’incapacité d’adaptation d’Hélène à la famille de Joachim, aux gags assez gros qui peupleront le film et à cette improbable chorégraphie qui s’orchestre sous nos yeux. Oui car, comme dans la Guerre est déclarée, Valérie Donzelli nous refait un film dansant, harmonieux dans lequel les corps de deux êtres s’expriment en un seul et même mouvement. Main dans la main n’est alors plus un film mais un ballet.
Au delà de cet esthétisme, Main dans la Main se révélera d’une puissance émotionnelle rare quand il nous parlera d’amour. Oui car au delà de la métaphore des aimants qui s’attirent inlassablement, Valérie Donzelli nous parle de coup de foudre et de destinée. Quand petit à petit on découvre la complicité entre Joachim et Hélène et on sent que cet attachement n’est finalement plus un handicap mais une chance de se découvrir, d’apprendre à se connaitre malgré les différences et de s’aimer vraiment. Leur combat contre cet amour ineluctable raisonnera longtemps en nous jusqu’à la fin du film. Et la mélancholie ressentie depuis le générique de début ne cessera de s’intensifier au fur et à mesure du film jusqu’au feu d’artifice final.
Même si dans ce troisième long métrage on pourrait énumérer les défauts (absence de vraie histoire, voix off peu utile, cliché, trop personnel, amateur …) force est de constater que Valérie Donzelli ose ! Avec son pari un peu fou, son sujet loufoque et difficilement exploitable, elle arrive à créer quelque chose d’unique, de rare, de précieux. Un petit rien qui devient beaucoup dès que l’on comprend que c’est d’amour qu’il s’agit. Même si on regrette le couple Elkaim/Donzelli devant la caméra, on est content de voir que Valérie Donzelli évolue et peut diriger des acteurs. Valérie Lemercier, si on l’a vu plus inspirée, est toutefois bien en place et forme avec Jérémie Elkaim un couple étonnant mais attachant. La scène de strip-tease est digne d’une Lemercier au meilleure de sa forme et risque de rester dans les mémoires ! Dans les seconds drôles Béatrice de Staël est toujours là et nous aura provoqué nos plus grands sourires.
Moins bouleversant que la Guerre est déclarée, Main dans la main se révèle tout aussi émouvant et poétique. Valérie Donzelli renoue avec le burlesque et propose une touchante réflexion sur l’amour et le bonheur. Le tout porté par une B.O encore une fois des plus réussies !
M.
2 Comments
Merci pour cette critique, je me laisserai certainement tenter!
Merci pour cette critique, je me laisserai certainement tenter!