Une faute d’orthographe, la crème du cinéma français, un sujet brulant et surtout un très émouvant prix du jury décroché à Cannes cette année auront suffi à faire de Polisse l’un des plus beaux films de l’année!

Le quotidien des policiers de la BPM (Brigade de Protection des Mineurs) ce sont les gardes à vue de pédophiles, les arrestations de pickpockets mineurs mais aussi la pause déjeuner où l’on se raconte ses problèmes de couple ; ce sont les auditions de parents maltraitants, les dépositions des enfants, les dérives de la sexualité chez les adolescents, mais aussi la solidarité entre collègues et les fous rires incontrôlables dans les moments les plus impensables ; c’est savoir que le pire existe, et tenter de faire avec… Comment ces policiers parviennent-ils à trouver l’équilibre entre leurs vies privées et la réalité à laquelle ils sont confrontés, tous les jours ? Fred, l’écorché du groupe, aura du mal à supporter le regard de Melissa, mandatée par le ministère de l’intérieur pour réaliser un livre de photos sur cette brigade.

Après le très réjouissant Le Bal des Actrices, Maïwenn se plonge dans la réalité d’un Hotel de Police et plus particulièrement au cœur de la Brigade de protection des mineurs. Quand on voit Polisse, on se dit que Maïwenn a quand même du cran et un talent incroyable. Du cran d’abord, parce qu’à une époque où les flics sont considérés comme des êtres fades et souvent stupides, elle réalise un film sur une brigade sympathique et nous donne une nouvelle vision de ce métier et de ces Hommes…

Du cran aussi, de parler de Pédophilie (oui car il est malheureusement très souvent question de cela) avec une telle justesse, une telle aisance. Ce drame qui frappe des milliers de familles et dont il est souvent très délicat de parler au cinéma. Certains s’insurgeront en voyant ces horreurs racontées avec une telle légèreté et diront sans doute qu’il est des sujets sur lesquels il ne faut pas s’attarder. D’autres verront ici une volonté de lever le voile sur ces atrocités trop souvent passées sous silence…  En plus d’avoir un culot monstre, Maïwenn prouve ici qu’elle a beaucoup de talent et que tout ce qu’elle touche se transforme en or à l’instar d’un Joey Starr métamorphosé et qui risque bien une nomination aux Césars…

En traitant d’un sujet si grave, Maïwenn pouvait tomber très vite dans un pathos exécrable cherchant à tirer la larme aux spectateurs. Elle évite le piège avec brio en proposant un portrait jamais triste et très décalé de cette brigade parisienne. Chaque policier apporte sa pierre à l’édifice et cette famille haute en couleur est vraiment réjouissante. Plutôt que de se concentrer sur les victimes des drames, la réalisatrice choisit de s’attarder sur la vie personnelle des brigadiers. Au milieu de ces horreurs, ils ont une vie, des sentiments et des mésaventures. Chacun faisant face à ses problèmes : quand l’une tente de rester fière lors de son divorce, l’autre ne parvient pas à avoir d’enfants ; quand l’un est amoureux de sa partenaire flic, l’autre dort sur le sofa de son chef après avoir été jeté par sa femme… Et tout ça avec une dose d’humour fracassant ! Toutes ces histoires donnent à Polisse une nouvelle lecture et le rendent pleinement humain.

On imagine mal Polisse se faire sans la présence au casting de tant d’acteurs talentueux ou en devenir à commencer par un Joey Starr loin, très loin, de son personnage au temps de NTM. Ici, il interprète avec une justesse folle ce chef de brigade amoureux et papa heureux et nous fait oublier l’imbuvable star médiatique des années 90. Sa brigade est elle aussi une parfaite réussite. Le duo fracassant Marina Fois / Karin Viard fonctionne à merveille. La froideur et l’humour de l’ex Robin des Bois agit encore et Karin Viard nous prouve pour la seconde fois cette année (après Ma part du Gâteau) qu’elle est l’actrice française du moment ! A leur côté, on est heureux de voir un nouveau visage de Nicolas Duvauchelle qui semble en avoir fini avec les seconds rôles sans envergures et de retrouver Jérémie Elkaim sans Valérie Donzelli cette fois mais toujours aussi charmant.

Comme à son habitude, Maïwenn se glisse dans son film d’une manière des plus intelligentes et des plus intéressantes. Dans Polisse, elle est Mélissa, une photographe bobo, mandatée pour suivre la BPM pour les besoins d’un livre. Un miroir très judicieux qui permet à la jeune réalisatrice de jouer son propre rôle dans le film : celle qui regarde, observe et capture chacun des moments de cette brigade, un peu comme la metteur en scène qu’elle est. Une mise en abyme parfaitement réussie.

Sans jamais s’enfoncer dans le morbide, Polisse propose une vision pleine de tendresse et de vie d’une brigade. Une fenêtre pleine d’espoir toujours drôle, parfois cinglante qui nous donne envie d’aimer la polisse police.

M.

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