Présenté en ouverture de la Semaine de la Critique lors du dernier Festival de Cannes, le nouveau film de Valérie Donzelli avait bouleversé les festivaliers et fait beaucoup parlé de lui. En compétition au festival Paris Cinéma, La Guerre est déclarée est un film boulversant, apocalyptique, fascinant et désarmant. Une ode à la vie incroyable.
Roméo et Juliette se rencontrent à une fête. Pensant d’abord à une blague, ils tombent amoureux et commencent ensemble une grande aventure. Plus tard, Juliette donne naissance à Adam. Alarmés par les cris incessants du nourrisson, Juliette et Roméo décident de consulter des spécialistes. Quelques examens plus tard, ils découvrent que le petit Adam a une tumeur au cerveau. Leur vie si paisible bascule alors et ensemble ils vont tenter de rester droit face à ce drame.
Drôle de projet que ce film… D’abord parce qu’il est autobiographique mais surtout parce que les parents de Gabriel (Adam dans le film) y joue leur propre rôle. Valérie Donzelli et Jérémie Elkaim ont donné naissance à un petit garçon, Gabriel, en 2002. 18 mois après sa naissance, alors que la guerre en Irak éclate , leur enfant est malade et atteint d’un cancer. La Guerre est alors déclarée contre l’injustice, la vie, la souffrance, le malheur, la colère et la mort. 8 ans plus tard, Gabriel est guéri mais les deux parents n’ont jamais oublié ces années d’angoisse. Ensemble, ils décident de re-écrire leur histoire. Ils deviennent Roméo et Juliette, un couple un peu bordeline qui donne naissance à Adam. Véritable exorcisme ils font ce film pour tirer un trait sur cette période mais surtout pour remercier les proches, amis et médecins, qui leur ont permis de gagner cette guerre. Un hymne à la vie comme un magnifique bras d’honneur à la mort.
Difficile de rester de marbre alors quand on voit Roméo et Juliette se battre contre cette saloperie de cancer. Difficile de se dire que ce qui est à l’écran, Valérie Donzelli et Jérémie Elkaim l’ont vécu. Qu’ils ont arpenté ces même couloirs, vécus dans ces même maisons pour parents, portés ces mêmes blouses bleus… Quand la réalité rattrape le cinéma (ou le contraire) le résultat est incroyable.
La Guerre est déclarée est un film extrêmement émouvant, où l’on assiste au combat de toute une tribue contre la maladie qui frappe le plus jeune d’entre elle. Pour autant, le film ne tombe jamais dans un pathos dégoulinant et évite de prendre le spectateur en otage. Valérie Donzelli choisit de ne pas laisser de suspens sur la vie de l’enfant et commence son film en mettant en scène l’enfant, Adam, 9 ans, guéri. Ainsi, le spectateur connait la fin et sait qu’elle sera positive. De l’émotion oui, mais elle n’est pas malsaine.
Le film parvient à s’éloigner de ce côté morbide et profondément émouvant, grâce à un humour présent de bout en bout. Un humour et un second degré nous montrant que l’espoir est encore permis. Plutôt que de s’apitoyer sur le sort de l’enfant, Valérie Donzelli choisit de filmer la vie et d’une bien belle manière! La vie qui continue, qui s’emballe, ralentit, exulte, alors que le ciel leur est tombé sur la tête. Le couple n’est pas abattu, il reste debout et pense au meilleur (à en voir cette scène incroyable où Juliette et Roméo préfèrent ouvrir le champagne pour célébrer la réussite de l’opération alors qu’ils apprennent dans la foulée que leur fils a un cancer…) Roméo et Juliette prennent le bon dans chacune des étapes de la maladie, ils décident de penser au meilleur et de ne pas s’encombrer du pire. Par moment on oublie même la maladie pour sombrer dans cette histoire d’amour incroyable et tellement poétique. C’est d’ailleurs cette histoire d’amour qui est la clef de voûte du film.
Beaucoup de détracteurs diront que Valérie Donzelli est devenue folle et est allée bien trop loin en se servant du cinéma comme thérapie. Que l’intimité d’un couple dans la douleur ne nous regarde absolument pas, et que l’intimité est violée. Pourtant, La Guerre est déclarée est avant tout un film où chaque dialogue a été appris, chaque scène répétée… Une fiction où tout est exagéré, survolté, fantasmé, romancé . Un espèce de voile est justement posé sur la maladie de l’enfant. Une belle pudeur au contraire. Un voile qui permet de mettre une distance entre la réalité et la fiction, caractérisé par ces prénoms “Roméo” et “Juliette”, amants maudits au destin tragique, par cette voix-off qui raconte le drame d’une manière totalement anodine, et par ces petits riens qui éloignent le film d’un documentaire sur les parents d’enfants malades.
On se dit que le film n’aurait sans doute pas été le même si l’enfant, le vrai, celui de Valérie et Jérémie, n’avait pas survécu… Mais à quoi bon, Gabriel est vivant et sa présence à la fin du film dans cette magnifique scène sur la plage filmée au ralenti vaut tous les happy ending du monde. On est heureux de le voir, heureux que malgré tout lui et sa famille soient encore debout, sur une plage, comme des enfants. La Guerre est finie, vive la Guerre!
M.
4 Comments
Tiens, on était dans la même salle le 7 juillet ? Au MK2 ?
En tout cas quel film, quelle claque, quel couple !
Hello, oui Pinkfrenetik on était dans la même salle ;) Dommage de pas s’être croisé. Et oui quelle claque! Je n’arrête pas d’y penser! Un prix demain?
Tiens, tu m’as donné envie d’aller le voir !
Hello, finalement j’ai été voir ce film !
Très bon. Sachant que les acteurs ont vraiment vécu ces péripéties, le film est d’autant plus poignant.
Avec rétrospection : très bon topic, bien joué “M.” ;)
Merci !